Hidden in Darkness
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XXIeme siècle, début d'un nouveau millénaire pour l'homme, maître sur Terre. Pourtant il est d'anciens êtres tapis dans l'ombre dont ils ne soupçonnent pas l'existance. Protègerez-vous vos congénaires ou fuirez-vous?
 
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 Catalina Petrescu

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Catalina Petrescu Empty
MessageSujet: Catalina Petrescu   Catalina Petrescu Icon_minitimeLun 19 Avr - 6:18

    Nom: Petrescu

    Prénom: Catalina

    Age: 24 ans

    Affectation souhaitée: Agent de Terrain

    Rang spécial si demandé: Aucun, pour le moment.

    Arme(s) choisie(s): En mission, elle ne porte pas toujours une arme, question de discrétion. Cependant, lorsque cela devient réellement nécessaire, elle prend avec elle deux couteaux et un pistolet. Rien de plus, sauf cas extrême. Elle a appris à se servir de ces armes.

    Description physique:

    { P r e l u d i o }


    Un matin de plus, à Londres, à Paris ou à New York. Un matin de plus et ma réalité est tellement vague que j’ai du mal à me situer. Où suis-je ? Qu’ai-je fait hier ? Quel crime ai-je encore commis ? Je voudrais tant m’excuser pour ce que j’ai pu faire.Tels sont les mots et questions qui me viennent à l’esprit quand j’ouvre les yeux sur le plafond d’une de ces somptueuses suites mises à ma disposition. Dieu que j’ai de la chance... Et dire qu’il y a quelques années, je dormais dans une gare. D’un revers de main, je balaye mes souvenirs, et déjà, je repousse la couverture jusqu’à libérer mes fines jambes de son étreinte. J’aplanis de mes mains par réflexe mes sombres cheveux aux curieux reflets bleus. Puis je me lève, méthodiquement, tout cela n’est que mon rituel du matin. Je jette un coup d’oeil au réveil.

    Huit heures. Quel ennui. Mon rendez-vous est à midi mais j’aime avoir le temps de me préparer, de tout appréhender... Il ne faudra pas traîner. Je me dirige vers la salle de bain, je frissonne entre temps, quitter les chaudes couvertures est toujours une déchirure pour moi. L’air est doux mais je ne peux m’empêcher de rapidement enclencher le processus le remplissement de la large baignoire en marbre, l’eau doit être chaude, c’est comme cela que je profite. Je scrute le visage qui apparaît dans le reflet du miroir. Quelle aubaine, encore ces fichues cernes. Je m’imagine soudain autrement, plus jolie, plus séduisante. Mais tout ce que je ressens en finalité n’est que l’amertume de n’être que moi. Cette pauvre Catalina. Pourquoi un visage si pâle ? Et pourquoi cette couleur de cheveux si peu naturelle ? Pourquoi des yeux bleus qui ne font que souligner ma froideur ? Pourquoi m’a-t-on donné ce physique ? Oh bien sûr, je ne devrais pas me plaindre, mais à chaque fois que je me regarde, je pense que c’est le seul héritage, ou presque, que m’ont laissé mes géniteurs. Et refléter leur image m’est insupportable.

    -Je te hais reflet, entends-moi bien, je te hais.

    Admirer ce spectacle une seconde de plus m’est insupportable, je baisse les épaules pour laisser glisser ma chemise de nuit. Je rentrer un pied dans le bain déjà bien rempli. La température de l’eau est si élevée que toute l’étendue de la peau de mon corps en frissonne, puis je m’allonge dans le bain, ressentant un plaisir infini lorsque chacun de mes membres, ma peau, et tout mon être s’engourdit et se détend. Je reste là quelques dizaines de minutes, je me lave méticuleusement et me rince abondamment. Lorsque j’en sors, je me retrouve une nouvelle fraîcheur, et bien que me sentant encore un peu faible, je me sens vidée de tous mes mots et je retombe dans l’oubli, ce bain m’a rincé de toutes mes peines.

    J’habille ensuite mon corps gracile d’habits sombres et confortables, la tenue appropriée pour passer inaperçue. Je m’observe à nouveau dans le miroir, pivotant sur moi-même et jugeant sévèrement mon manque d’assurance flagrant. Enfin, je me décide à m’en aller, mais avant cela, je prépare les derniers petits détails, je vérifie que je n’ai rien oublié et je m’en vais déjà, pour un « nouvelle aventure ». Si l’on peut dire... Lorsque je claque la porte, je ressens la tension et l’appréhension qui me prennent chaque matin, tendant mes muscles comme des fils de funambules. Je tremble une dernière fois, et puis je fais face. Aucune erreur ne sera acceptée aujourd’hui.


    Description mentale:


    { I n t r o l u d i o }

    Je ne suis pas l’ombre de moi-même, je ne peux l’accepter. Et ma vie n’est dictée par aucune loi, aucune histoire, aucune voix ne me dira ce que j’ai à faire. Personne ne me volera jamais mon âme. Pas même un monstre. Je resterai le seul et unique maître de moi-même, quitte à être haïe de tous, je le jure devant Dieu, devant sa sainteté et devant l’assemblée du Vatican, jamais ils ne m’auront, jamais ils ne détruiront ce que j’ai construit au creux de moi-même. Et cela même si je viens à mourir. Mais je ne mourrai pas, ma tâche dans ce monde n’est pas achevée. Je dois encore le faire. Je n’ai jamais été quelqu’un de facile, même enfant, on se plaignait déjà de moi. Mon silence récurrent angoissait et irritait déjà les autres enfants et ceux qui s’occupaient de moi. On me blâmait de me moquer, ou d’être trop ignorante. En vérité, je ne supportais aucun d’eux. Tous ces êtres qui ne m’avaient jamais cru, qui s’étaient retournés contre moi. Je leur vouais une haine sans limites. J’avais alors perdu toute la douceur dont on m’avait dotée à la naissance, presque comme un animal qu’on a trop souvent maltraité.

    Plus tard, en apprenant à vivre seule et par moi-même, j’appris à vivre solitaire et je emprisonnais dans un froid mutisme et je ne m’adressais à personne. Là encore, je fus montrée du doigt. Mais j’avais été trop souvent déçue par ceux de mon espèce, et pour ces raisons, j’avais voulu me construire une forteresse autour de moi, pour m’y cacher, me dissimuler, et qu’on ne me voit plus. Je n’existais plus. Et j’avais peur, j’avais peur de ce qui me menaçait sans cesse dehors. En prenant de la maturité, au fil des années, j’appris que je ne pouvais vivre seule et qu’il me fallait m’ouvrir aux autres, pour apprendre et découvrir. C’est ainsi, qu’encore timide je repris goût à connaître les autres et à m’instruire, à me lier aux autres, mais jamais trop, pour ne pas devenir proches, pour ne pas m’attacher. Car je savais au fond de moi, que je ne resterais jamais au même endroit.

    En dépit de cette ouverture aux autres, je restai relativement renfermée sur moi même, et je ne me sentais jamais aussi bien qu’une fois seule, sans bruit, chez moi, sans que personne ne soit là pour me perturber, ou me mettre mal à l’aise. Je gardais ainsi un minimum d’intimité et tâchais de laisser tous ces êtres autour de moi, le plus loin possible. Lorsque je me mis à voyager, il me devint encore plus difficile de me lier aux autres. Je n’étais pas habituée à me rapprocher si rapidement des autres, il me fallait un long processus de confiance... Sans quoi, je fuyais sans demander mon reste. Toutefois, cette solitude enrichissante dans les sous-sols des musées m’apprit à apprécier mes nouveaux compagnons qu’étaient les archives et livres. Je rougissais lorsqu’on m’adressait la parole ou qu’on me posait une question. J’étais presque devenue le rat de bibliothèque sans aucune personnalité. J’avais plusieurs fois entendu des collègues évoquer mon nom en ces termes.

    Une fois engagée par l’organisation, il me fallut reprendre un peu de ma forteresse pour me protéger des autres et de leurs dires. Je m’éloignai de la population dite « normale » et fis connaissance avec d’étranges personnes, mes collègues. Lors de mon entraînement, j’avais dû reprendre confiance en moi et ne plus avoir peur de ce qu’il y avait dehors, je m’étais endurcie, et j’éprouvais ainsi, moins souvent la peur, la gène, le malaise. J’étais devenue maître de moi-même. Bien sûr, tout me sembla alors devenir irréel. Je ne vivais plus que pour surveiller des êtres dont l’humanité ignorait l’existence et je n’avais de contact qu’avec des agents souvent tourmentés, parfois violents, silencieux et prêts à n’importe quoi. Et même si leur témérité était admirable, j’étais effrayée par tant d’entrain, je me demandais régulièrement la signification de nos actes, sa justification. Je me demandais, si Dieu cotisait vraiment tout cela. Dans mes rêves, j’en arrivais même à la conclusion que tout cela n’avait jamais existé et que je l’avais rêvé. N’étions-nous pas en train de mentir à toute l’humanité ? Ne faisions-nous pas le choix de faire preuve d’une extrême violence sans le consentement de qui de droit ? Non, car... l’Eglise prévalait. Et il fallait que je la garde à l’esprit.


    Histoire:

    Journal de Catalina Petrescu.
    {1}


    Souvenirs d’une mission du 20 septembre sur la personne de Nicolas des Hautsrochers.

    Je me trouvais à nouveau face à l’un de ces Vampires et ne sus réprimer une nouvelle expression de dégoût. Non pas qu’il existait en apparence une quelconque raison de trouver ces êtres laids ou dégoûtants. On leur reconnaissait même, en dépis de ce regard effrayant, doté d’une pointe de sadisme, de beaux traits, charismatiques, presque envoûtants, ce qui ne leur donnait pas de mal à entraîner leurs victimes dans leurs demeures mortuaires. Mais je passai vite mon regard sur autre chose, et cela le plus naturellement possible, afin que ce suceur de sang ne remarque pas que notre organisme l’avait repéré. Je me demandai d’ailleurs s’il se doutait de quelque chose. Savait-il qu’il était surveillé en permanence, ou presque ? Qu’il ne pouvait traverser une rue, prendre un bain de foule, sans qu’un de nous garde un oeil sur lui en prévention d’une quelconque attaque. S’il se faisait prendre, c’en était fini de lui, mais le savait-il seulement ? Il avait l’air serein, beau par la pâleur de son visage, toutefois coloré par quelques touches de couleur, sur ses lèvres, et aussi dans ses yeux, d’un discret pourpre. Mais à chaque fois que je m’autorisais à l’admirer quelques instants, mon dégoût me rattrapait rapidement, je manquai de lui cracher directement à la figure.

    La rue était pleine, j’observais chaque détail avec précaution, examinais la situation, redoublais de prudence dans les coins les plus délicats. S’il se mettait à courir soudain, je devais être prête à le prendre en fuite, s’il disparaissait dans la foule... Non, il ne pouvait disparaître, je devais le garder dans mon objectif. S’il s’envolait soudain dans la nature, c’est qu’il avait compris, c’est qu’il savait, que nous avions commis une erreur, et c’était inadmissible. Je surveillai un instant mes arrières, reconnut quelques uns de mes collègues, prêts eux-aussi.

    Quelle ambiance. Des sourires partout. J’aurais voulu être moi aussi, des festivités, mais quelle idiotie d’y penser. Je ne faisais plus la fête, plus depuis des mois, des années. Et qu’aurais-je fêté d’ailleurs ? Une réussite...? Les lumières brillaient dans la nuit sombre des quartiers en vogue de Paris. Je repérai une entrée de métro. Il ne la prit pas. Où nous menait-il ? Il devait avoir soif, une soif désespérée depuis le temps qu’il ne s’était plus nourri. Ou alors, à notre insu. J’essayais de ne pas y penser. Une fois le travail accompli, j’oublierais cela, j’oublierais que j’avais peut-être omis quelque chose, j’enfouirais cela, au plus profond de mon âme, et m’assoirais dessus, comme pour faire tout disparaître.

    J’avais été choisie pour Paris grâce à ma bonne maîtrise de la langue française, l’immersion n’était pas bien difficile pour moi, bien que je ne représentais nullement l’image d’une Française dans toute sa jeunesse et sa liberté. J’étais quelqu’un de réservé, et de peu sociable, mais pour les missions, je faisais quelques exceptions. Ce n’était pas mon premier voyage à Paris, je voyageais beaucoup, «visitais», entretenais mon amour des langues. J’étais la discrétion même, c’est pourquoi, suivre à la trace une créature lors de ses voyages à l’étranger, ne posait pas problème. Je n’étais pas l’une de ces beautés splendides, qui avaient pour vocation d’attirer la bête dans un piège. Non, on ne me remarquait pas, et j’étais pour cette raison, une merveilleuse «espionne». Le terme m’irritait, l’espionnage ne m’avait jamais plu en son principe de base, mais j’avais ravalé ma salive lorsque j’appris qui je devais tracer et observer. Des monstres sans scrupules et nocifs. Je sursautai, soudain.


    -Excusez-moi...?

    Des yeux croisèrent les miens, arborant un sourire d’un charme exquis, le tout doublé d’une voix et d’un accent à faire chavirer n’importe qui. Je pris peur, d’abord, d’avoir perdu ma cible. Jusqu’à ce que naïvement, je réalise que ma cible et mon interlocuteur, ne formaient qu’une seule et unique personne. Je masquai du mieux que je pouvais ma stupeur. C’était fini, j’étais prise au piège, repérée, cette mission touchait à sa fin. Dans ma surprise, j’avais oublié de répondre.

    -Mademoiselle ?

    Je me confondis en excuses, maladroitement, j’avais perdu mes moyens. Non seulement parce que j’avais peur des conséquences, mais également parce que je n’avais encore jamais été surprise par un de ceux-là. Je ne pus m’empêcher de remarquer une fois de plus sa resplendissante beauté.

    -Pardonnez-moi Monsieur, je songeais...Je ne m’attendais pas à être ainsi surprise.

    Devant son regard plein de crédulité, je commençai à croire qu’il ignorait qui j’étais et qu’il était tombé sur moi par accident. Quelle dangereuse ironie.

    -Vous l’avez fait tomber...

    Il tenait dans sa main une petite chose qui m’était familière. Rien d’étonnant à cela puisque c’était du collier de ma mère dont il s’agissait.

    -Dieu...! Merci Monsieur, vous êtes trop aimable...! Comment vous remercier ? J’ai probablement du mal l’attacher... Oh... Je suis si confuse.

    Il souriait. J’avais l’air stupide. Quelque part, je lui étais réellement reconnaissante de l’avoir trouvé. Comme j’aurais été peinée si je l’avais perdu. Quel nouveau et étrange sort. Il passa dans mon dos et glissa ses deux mains devant mes yeux pour entourer mon cou comme naturellement afin de m’attacher à nouveau ma capricieuse parure. Je sentis ses mains froides sur ma nuque et frissonnai. J’ai honte d’admettre qu’il n’y avait pas que de la terreur dans l’éclair qui me traversa le dos, je trahissais aussi une once de plaisir. Je gardais pourtant en tête que tout cela pouvait n’être qu’en finalité de la manipulation et non un pur hasard comme je l’espérais du plus profond de mon âme. Sans quoi...

    Je tentai de deviner son regard sur mon cou. Il devait se retenir car je crus sentir un tremblement dans ses mains lorsqu’il les éloigna de ma peau pour me faire face à nouveau.


    -Je vous en prie... J’ai... l’impression, sans doute idiote, de vous avoir déjà rencontrée quelque part.

    Il marqua une pause. Il parut pensif, comme nostalgique.

    -Sans doute était-ce il y a bien des siècles...

    Je souris naïvement. Il ne devait pas savoir que je le croyais honnêtement lorsqu’il parla d’un passé si lointain. Sauf qu’il faisait erreur, je ne le connaissais pas de longue date, en tout cas pas depuis l’éternité que représentaient pour moi des siècles et bien des générations de Petrescu.

    -Je ne crois pas Monsieur, ou alors, était-ce dans une autre vie.

    Il rit un instant, cette plaisanterie qui devait plus l’amuser que moi-même, lui rappelait qu’il avait mené bien des vies en bien des lieux.

    -Comme vous êtes pragmatique... Mademoiselle...?

    -Cat...Kathleen...Bentley. Monsieur...?

    -Nicolas des Hautsrochers. Quel joli nom vous avez là...Mademoiselle. Mais je ne me serais jamais doutée que vous n’étiez pas d’ici. Et pourtant votre nom le signale en vous précédant. A moins que vous n’ayez vécu ici. Ce qui ne m’étonnerait guère au vu de votre langue et de votre accent presque invisible.

    Je tremblai légèrement lorsque je l’entendis prononcer de sa propre bouche le même nom qu’il portait depuis toujours. Celui que portait le dossier qui le concernait, que j’avais lu et relu. A quoi rimait tout cela ? Me testait-il sur ma résistance ? En admettant qu’il sache qui j’étais.

    -Ravie de vous rencontrer Monsieur des HautsRochers, je vous remercie pour votre compliment. Je suis en effet Anglaise, une authentique Londonienne, si je puis dire. Je visite à nouveau les merveilleuses rues de Paris et je fais de bien belles rencontres.

    Tout ce que je racontais était un tissu de mensonge. Je n’étais nullement de Londres, mais j’aurais pu mentir, encore une fois, puisque j’en connaissais la langue. Je ne visitais rien à Paris, j’étais là, expressément pour lui. Quelle chance il avait... de m’avoir à ses trousses. Je mentais comme on respire, sans aucun scrupule, j’y étais habituée. Au début, ça avait été difficile, surtout de ficeler en moins d’une seconde, un scénario correct et cohérent, une histoire émouvante, à déballer, à qui veut l’entendre. Un vampire, ou une autre créature de ce type si possible. C’était parfait. Enfin, même si j’appréhendais la suite. Après tout, pourquoi s’encombrer de remords quand on savait qu’on avait rendez-vous avec la mort ?

    -Comme vous me faites honneur Mademoiselle Bentley. De nos jours, nous ne sommes plus habitués à tant de courtoisie de la part des jeunes gens. Mais je parle comme un vieillard... Après tout, je ne dois être votre aîné que de quelques années !

    A nouveau, je me retenais de rire aux éclats. De quelques siècles maximum. Je pouvais être peinée pour lui. Après tout, il était condamné depuis tant d’années à errer dans le temps, sans aucune issue. A part celle de nos méthodes, de plus en plus efficaces, de plus en plus barbares si l’on en croyait les yeux de Dieu.

    -Du haut de mes vingt-quatre ans, je veille à préserver la belle langue, au cas où je rencontrerais des personnes de valeur qui aiment comme moi ce qui est beau et doux à l’oreille.

    -Et vous avez raison...

    Je regardai autour de moi. Une bulle invisible s’était créé entre nous et le reste de la foule, qui nous contournaient, inlassablement, mais se plaignant de temps en temps, que nous gênions le passage en une heure si mouvementée. Mais nous nous en fichions. Moi j’observais ma cible, lui charmait sa proie. Et avec quelle insistance.

    -Eh bien...dis-je. Je crois devoir prendre congé. Je pense qu’il est temps pour moi de rejoindre la maison d’hôte où j’ai ma chambre afin de terminer cette soirée en beauté à l’aide d’un sommeil bien mérité.

    Il fallait que je le teste. Que je fasse avancer les choses. Soit il se débarrassait de moi, soit il me gardait, et il jouait encore, jusqu’au moment crucial. J’observai en son visage une pointe de déception et de contrariété. Je compris en cet instant qu’il ne me laisserait pas partir.

    -Mais enfin, vous n’y pensez pas ! Cette ville est tellement plus appréciable lors des soirées douces comme celle-ci, où l’air n’est plus lourd, et que ne pouvons enfin le respirer pur et festif. Paris est une ville faite pour ceux qui vivent la nuit, et il faut absolument que je vous emmène dans un petit bar, tout à fait pittoresque.

    -Eh bien... Monsieur... Si vous insistez, je crois que je n’ai pas le choix.

    Je tenais ma cible. Et même si je me mettais en danger en faisant cela, même si je risquais gros, au moins, je ne la perdrais pas de vue. Et puis, j’avais encore un peu de temps avant qu’il se décide à se mettre « au travail ». Je pouvais réfléchir à mon plan, plus ou moins sereinement. Je n’avais cependant aucun contact avec mes collègues, car pour les agents comme moi, qui devaient se placer en plein milieu de l’action, aucun risque n’était permis. Je sentis pourtant leur présence non loin de moi, veillant à ce qu’il n’arrive rien. Je supposai qu’ils devaient se demander ce qu’il était en train de se préparer, ils nous suivraient sûrement, aussi discrètement que faire se peut dans notre lieu de destination. La prochaine fois,pensais-je, je mettrais un micro.

    Avec une intuition impérieuse, digne d’un Don Giovanni, il passa un de ses grand bras, autour de mes épaules, me pressant légèrement, moi si frêle, contre son torse long bien bâti et avec ses grandes mains, qui m’auraient broyé les os comme on casserait une brindille. Son aura était froide, pourtant, j’apprenais combien il était agréable et envoûtant d’entrer en contact en son sein. Comme je comprenais aisément alors avec quelle facilité on pouvait se laisser mordre par l’un deux, aussi naïvement que le ferait un enfant. Mais je devais garder mon objectif bien en vue, et le pousser à prendre son temps, et refermer le piège sur lui, au péril de ma vie, si c’était nécessaire. Je garderais la tête froide, quoi qu’il se passerait, quoi qu’il m’arriverait. Seule ou pas, perdue ou triomphant.


    -Pardonnez-moi cette familiarité. Pour un homme comme moi qui s’attache si vite aux belles choses, la protection est la première des missions.

    Bien sûr, connaissant lui-même ses atouts et son charme, il se doutait qu’aucune femme ne résisterait à son approche et à ses bras, aussi froids furent-ils. Il donnait juste consistance et justifications inutiles à ses actes d’une grande douceur. Nous arrivâmes après quelques minutes de marche pressée devant une porte en bois, que nous poussâmes sans perdre trop de temps. C’était un endroit sombre, et intime, chose que j’avais prédit avant même d’arriver devant la porte. Il était connu en ces lieux, je le compris quand il fit juste un signe à ce qui semblait être le patron et choisit sa table le plus naturellement du monde. L’endroit était bien entendu, à l’écart des autres tables, et caché des regards indiscrets. J’en devinais les raisons, et ne frémissais même pas en imaginant ce qui m’attendait. Le silence était de marbre, jusqu’à ce qu’il vienne l’interrompre en me laissant m’asseoir et libérant ainsi de son étreinte sa prisonnière. Plus je m’habituais à sa présence, plus une douce et agréable quiétude me gagnait jusqu’à ce que j’en sois arrivée à me demander s’il prenait autant de temps avec toutes ses victimes, s’il aimait jouer avec la nourriture avec tant de précautions à chaque fois, ou s’il lui arrivait d’utiliser simplement la surprise et de mordre la victime avant qu’elle n’ait eu le temps de crier.

    -Quel bien joli endroit... Il faut habiter le coin pour le connaître je suppose... Ce n’est pas comme ces endroits bondés de touristes et bruyants où on gagne à tous les coups, le droit de se plaindre de migraine. C’est bien aimable à vous de le partager avec une de ces touristes.

    Tandis que je répondais, je sentis qu’il détaillait mes lèvres. Il sourit, imperceptiblement, laissant ainsi un silence ému se glisser entre nous. Après quelques instants, il laissa échapper un léger rire et répondit à cela.

    -Vous n’êtes pas une touriste... Kathleen (Vous permettez que je vous appelle comme cela, n’est-ce pas ?)... Vous avez déjà pris possession des lieux.

    Je fus rassurée lorsqu’il termina sa phrase. Encore une fois je sentis qu’il me manipulait mais n’osait encore y croire. Je pensais que de toute façon, le résultat serait le même. Il était juste en train de m’enrober de sucre, pour mieux pouvoir me déguster. Il me dit cela avec tant de délicatesse, de tact et de tendresse, que j’eus l’impression d’entendre une sérénade en mon honneur. Quel beau jeu d’acteur, quel artiste. Je ne pouvais m’empêcher d’être attirée par lui, et de l’admirer. Je m’en voulais déjà de trop m’attacher à ce monstre et de craindre le futur que les autres et moi lui réservions. Mais après tout, c’était lui qui avait commencé les festivités. Je tentais de me contenter de cette justification.

    -Que voulez-vous dire...? Et puis non, cela importe peu...

    La soirée, ou la nuit devrais-je dire avançait à bon train à mesure que nous apprenions à connaître les mensonges plus ou moins vrais de l’autre. Le répit restant de Nicolas des HautsRochers diminuait au fil des minutes et il prenait plaisir à le perdre en ma compagnie, pour une raison qui m’était inconnue. Après tout, il aurait très bien pu passer sa soirée en d’autres lieux et en d’autres compagnies, chassant, plus rapidement, et se revigorant avec une plus grande facilité. Mais il n’en était rien, il restait là, profitant de la douce nuit et du goût qu’on prend à discuter des simples choses de la vie, la vie de tous les jours, celle qu’il ignorait, et qui peut-être lui manquait. Bientôt il me sembla que je le connaissais depuis toujours et qu’il était devenu mon ami de longue date. Mais je tentai de garder bien en tête que tout cela n’existait pas, et que ce n’était là que poussières et futilités.

    Il décida alors de nous emmener ailleurs. Il était devenu impensable pour le personnage que j’incarnais de finir la nuit sans la présence de ce cher inconnu, répondant au prénom de Nicolas, cette créature dite sans âme. Je souriais béatement, me prenant au jeu de l’éprise, la jeune fille conquise « dés le premier regard ». Quelle hypocrisie. Quelle jeu délicieux. Quelle exquise soirée. Je découvrais ainsi qu’il n’était pas mauvais de prendre plaisir en travaillant, même si l’attitude cruelle et le plaisir que je prenais à préparer mon piège aurait provoqué certainement un dégoût aux yeux des âmes pures. Ce qu’elles pensaient, je ne m’y intéressais guère, la seule chose qui me préoccupait et m’inquiétait à la fois, c’est ce que moi-même j’allais finir pas penser en me prenant à ce jeu vicieux certes, mais plaisant. Il faisait encore nuit dehors, Nicolas était maître du temps, il savait très bien quand il serait temps pour lui de faire tomber le rideau.

    Nous décidâmes de finir cette nuit en nous promenant sur les bords de la Seine. Je profitais ainsi d’une vue mélodieuse et nostalgique, grâce à cet assassin charmant et connaisseur des lieux qui m’évitait de croiser les plus sombres coins et quartiers de la capitale de la beauté. Je ne savais même plus si les autres agents avaient pu nous suivre, si mon nouvel ami n’était pas parvenu à les semer. J’avoue que je m’en étais désintéressée. Que je ne réfléchissais plus à rien, que j’étais perdue dans ce spectacle sans nom, dans cet envoûtement, moi aussi prise au piège, comme dans un rêve où il m’aurait été impossible de courir. Je ne réfléchissais plus, j’étais captive. Combien de temps me restait-il ? Je l’ignorais, je ne vivais en cet instant que pour ce qu’il m’arrivait, le reste me paraissait fade, et sans importance, je ne voulais pas entendre les discours ennuyants des autres. Je ne voulais entendre que sa voix, ne sentir que sa présence. Le reste n’existait plus. Nous nous assîmes sur l’un des bancs de la berge. Je respirai profondément.


    -Existe-t-il en ce monde une chose plus belle que celle-là ? D’un étranger pour une étrangère, assis sur un banc, dans un lieu bien connu des livres, un lieu qui a traversé les temps. Si cette chose existait, je voudrais qu’on me la présente, car malgré mes voyages, je n’ai pas eu le plaisir de me sentir mieux exister qu’en cet instant. C’est ainsi que je me sens le plus vivant, ou le moins mort.

    Le charme opérait. Rien de ce qu’il aurait pu dire n’aurait su me choquer. J’étais servante de ses actes. Il continua.

    Bientôt le ciel s’éclaircira, et nous serons séparés,
    Je n’existerai plus pour vous, vous disparaîtrez de mes pensées,
    Laissez-moi donc rallonger, ces quelques moments de plaisirs,
    Laissez-moi donc vivre encore un peu, avant d’à nouveau mourir,
    Et revivre chaque soir, rencontrer nouvelle âme,
    La prendre, la vider, s’emparer de sa flamme,
    Je ne vis que comme un monstre, d’elle je suis détesté,
    Je ne la tiens en cet instant que parce tous mes désirs sont exaucés,
    Pourtant de tous ceux-là, un me résiste,
    Je voudrais que pour elle, mon âme existe.
    Bientôt l’aube, Bientôt l’alouette,
    J’aime vivre ces instants, J’aimerais embrasser une Juliette.

    Je l’observai de mes yeux et de mon visage vidés d’expression. Tout ce qu’il disait me plongeait dans une admiration encore plus forte et plus en amour de tout ce qu’il représentait en cet instant. Pourtant, je ne pouvais comprendre ce qu’il disait, je ne pouvais en saisir le sens. Je ne sentais pas venir le danger à mesure que le ciel n’était plus si sombre. Bientôt la mort frapperait à ma porte, et personne ne serait là pour me défendre, même pas moi. Tout ce temps d’entraînement, toute cette haine, et finalement, pour rien. Pour se laisser entraîner bêtement dans une contemplation prae-mortem. Rien ne m’importait. Je n’étais plus Catalina, je n’étais pas même Kathleen. Il me possédait. Il me maniait, m’utilisait. J’allais mourir de ces mains, mais aussi des miennes qui avaient donné leur part de responsabilité dans ce suicide inconscient. Mais tout cela n’avait plus d’importance, mon corps sans âme, mon âme perdue dans les nues, mon corps somnambule...

    Ma tête en appui sur son épaule fut relevée par ses mains et avec une douceur il se préparait à l’acte ultime. Une mort devant la Seine, à Paris, quelle belle histoire, quelle tragédie, d’une tristesse sans nom. Ce fut alors le moment.


    -Vous m’excuserez, Mademoiselle. Dans une autre vie... Nous nous reverrons...

    Il approcha son visage de ma nuque puis s’y enfouit comme pour s’y cacher. Je sentis inconsciemment son nez carresser ma peau et y inspirer de longues bouffées d’air parfumé de mon aura. Il prenait plaisir à faire durer l’instant. Ensuite ce fut au tour des lèvres de se déposer sur ce cou qui désormais ne m’appartenait et tout cela avec une grande tendresse. L’acte sembla durer une éternité. C’était maintenant ou jamais. Le moment de retirer toute trace vitale de ce corps jeune et prisonnier du charme, l’instant d’arrêter cette vie de s’éterniser et de connaître ainsi une durée éphémère et bien plus plaisante que celle qu’un être de son espèce pouvait connaître.C’était mon corps, ma vie, sa durée. Je l’avais oublié. Et pourtant, il n’en fut rien, il se résigna, tout simplement, se contentant de déposer un baiser sur cette peau qui le goûtait tant et dont le nectar lui aurait apporté tant de bien. Mon nectar, ma peau, ma vie. J’étais sauvée. Il réprima un grognement. Quelle faiblesse, quelle déception.

    J’étais pourtant toujours inconsciente et crédule, incapable de décider de mon propre chef, hypnotisée, presque folle. Tous les symptômes des amourachés. Et pourtant, on en était loin. Rétrospectivement, je dirais sûrement que cela n’avait rien de tendresse, et d’admiration, juste un mauvais sort. Il n’avait pas encore fui. Il me regardait encore, se demandant probablement pourquoi il n’avait pas fait ce qu’il avait à faire. Il me regarda dans les yeux, longuement, jusqu’à ce que je commence à reprendre mes esprits, à réaliser où j’étais, que je prenne conscience de ce qui venait de m’arriver. Et simplement, il me sourit, alors qu’il savait pertinemment quelle sort je lui aurais souhaité dans le pays de la conscience.

    Avant juste que je ne commence à me débattre et pour signe d’adieu, il saisit mon visage encore engourdi entre ses deux mains, et embrassa mes lèvres avec fougue, comme l’être entre l’ange et l’animal, l’aurait fait. Je me sentis durant ces quelques instants re-transportées et rêveuse, jusqu’à ce que j’ouvre les yeux et l’entende dire ces mots. Je me retins presque de chercher à nouveau le contact entre ses lèvres et les siennes.


    -Au revoir Catalina...Petrescu... Et à bientôt dans une autre vie.

    L’instant d’après, il avait disparu, et mon inconscience avec. Je découvrais enfin ce qui venait de m’arriver. Je palpais mes lèvres et mon cou, je me sentais toute moite, faible. Un instant plus tôt, j’en étais sûre, il était là.

    Longtemps encore après, je m’en voudrais, je me détesterais de cette faiblesse. Je l’avais laissé s’échapper. Ne savais-je pourtant pas qu’ils étaient maître de leurs actes et qu’en de très rares occasions, une personne à elle seule, pouvait vaincre l’un d’entre-eux ? Qu’importe. Bien entendu, mes collègues ne savaient rien de ce qui s’était passé et ils ne mettraient jamais la faute sur la pauvre victime que j’étais. Mais je m’en voulais terriblement d’avoir été si faible. Je ne pouvais également que sentir la honte de voir naître en moi un début de manque pour cet être détestable. Ses pensées commencèrent à m’accompagner. Il m’habita, à partir de ce jour.

    Quelques secondes de conscience plus tard, et je m’effondrai de fatigue sur ce banc au bord de la Seine, devant le doux spectacle qu’apporte la contemplation de l’aube à Paris.



    Journal de Catalina Petrescu, Suite.
    {2}


    Aucun titre, Réflexions du 22 septembre au soir. Dans la chambre.

    -Quelle honte pèse sur moi... Comme je me déteste.

    Je caressai à nouveau ce cou qu’il avait touché. J’avais pu me souvenir de tout ce qui s’était déroulé ce soir-là, à peu de choses près, suite à un repos bien mérité : ce qu’il m’avait dit, où nous nous étions rendus, dans quel état d’esprit j’étais, et quelle honte je portais désormais. Bien entendu, j’avais gardé tout cela pour moi. Il n’était nullement nécessaire de raconter mon expérience personnelle à l’organisation, qui en plus de cela, n’obtiendrait aucune nouvelle information sur la personne de Nicolas, puisque nous connaissions avant cela les grandes qualités, si l’on peut dire, de ce vampire. Il n’était pas non plus nécessaire de préciser qu’il nourrissait désormais en mois une légère inclination qui me pousserait probablement par la suite à chercher à le revoir. Ce que je devais m’interdire. Je ne pouvais me permettre à nouveau cet échec. A cause de moi et de ma négligence, je pouvais l’admettre, de nouvelles vies étaient en danger. Je commençais seulement à deviner la portée de mes actes, et ô combien il était facile d’avoir un impact sur la vie d’autrui.

    Lorsque mes collègues m’eurent retrouvée, assoupie sur ce banc au bord du fleuve, ils ne comprirent pas ce qui avait pu se passer. Par la suite, je m’excusai et donnai des justifications complètement invraisemblables mais qui leur suffirent. Après tout, cette vie elle-même, avait tout d’invraisemblable. Lorsque je regagnai le quartier général de Paris, j’eus droit aux questions de routine concernant ma mission, et son échec, qui, disait-on, était tout à fait excusable. J’eus même droit à quelques sourires alors que je me lançais dans un début d’aversion intérieure. Plus je reprenais contrôle de moi-même, plus cette haine grandissait. Le vampire devait se délecter d’un tel spectacle. J’avais par la suite regagné mon lieu de résidence, « pour un repos bien mérité », un repos qui dura près d’une journée. Suite à quoi, je me retrouvais pensive et éveillée dans cette grande et belle chambre à sentir perpétuellement près de moi une présence à la douce odeur.

    J’avais eu beau me laver et me frotter le plus durement la peau, rien n’avait eu d’effet, je restais prisonnière de cet aura que j’apprenais à haïr et à aimer plus, chaque seconde supplémentaire qui s’écoulait. Je gagnai ensuite à nouveau ce lit sur lequel je m’allongeai et méditais.

    J’allais probablement être désaffectée de cette mission, de ce cas. Je n’aurais plus rien à voir avec ce pompeux de vampire. Je reprendrais un cours de vie normal et par la suite, ne m’autoriserais plus aucun de ces contacts avec l’une de mes cibles. Je resterais éloignée, invisible et inaccessible. Je n’existerais plus. Plus pour l’un d’entre-eux en tout cas. Ce serait strictement professionnel. Et je garderais ma froideur impassible quoi qu’il arrive.



    Journal de Catalina Petrescu (suite)

    {3}


    Quelques jours après l’incident du 20 septembre. En attente d’une nouvelle affectation. Paris.

    Il y avait déjà quelques jours que j’avais commis l’irréparable et je me trouvais toujours là, cloîtrée dans ma chambre, n’en sortant que pour prendre mes repas, respirer un peu d’air frais, et rentrer aussitôt dans mes appartements, telle une prisonnière de ma propre décision. Je voyais en le fait qu’on ne me donna pas tout de suite une nouvelle mission, un désir de la part de l’organisme de me donner des vacances, pour que je réfléchisse, que je me repose, et que je prenne un peu de bon temps. Je pensais qu’ils cherchaient surtout à me signaler que ce genre d’erreur n’était pas tolérable à de multiples reprises. Ainsi, j’étais prévenue.

    A priori, ces vacances auraient du me sembler être comme une bénédiction. N’avais-je pas rêvé quelques jours plus tôt d’un peu de repos et de détente ? Je n’étais pas un robot, insensible, et sans distractions. Et même si je ne laissais paraître par moment, que de l’indifférence, je parvenais à m’amuser, de temps en temps. En dépit de cela, à cette occasion, je ne pouvais voir ce temps de congé que comme un fardeau, des jours à écouler, sans rien faire, en me cachant du mieux que je le pouvais. Paris en une autre occasion, aurait pu être un lieu de rêve mais je n’avais pas tiré la bonne carte et j’en payais les conséquences. J’attendais, jour après jour, qu’on me prévienne de ma nouvelle affectation, une nouvelle ville, un nouveau lieu, loin de Paris et du reste.

    Les jours et les nuits se confondaient pour moi, puisqu’il n’y avait rien à faire sinon attendre. Je passais la moitié de la nuit à surveiller la rue, le ciel et les toits, par ma fenêtre, craignant et espérant à la fois, une intrusion fatale. Je m’endormais chaque fois au petit matin, étant presque certaine qu’il ne viendrait plus désormais et puis je me réveillais, encore fatiguée et décalée, je me sentais comme une batterie trop rechargée, qui s’usait au fil du temps, et parvenait à peine à faire les choses quotidiennes : manger, respirer, se laver. Je n’étais alors plus si loin du robot. Devenue l’ombre de moi-même, et n’ayant aucunes nouvelles instructions, des cernes se creusaient sous mes yeux. Je pâlissais progressivement jusqu’à ressembler à l’un d’eux, bien qu’aussi transparente qu’un fantôme, et dotée d’une beauté bien moins éclatante.

    Je me sentis tellement pathétique que j’en arrivai à délirer toute seule ou presque, ne parlant que pour moi-même, en espérant que personne n’était là pour s’amuser de ce pitoyable spectacle. J’en arrivais à me repasser inlassablement le film de ma vie pour me distraire. Songeant à ce que j’aurais du faire et ce que j’aurais pu éviter. Je me ressortais de vieilles rancœurs et espérais des choses stupides, irréalistes et sans importance. La vie n’était plus qu’un rêve, et je vivais dedans. Je songeais à mon passé, et à ce qui m’avait amené à en arriver là, à ce point précis, dans cette maison d’hôte, prisonnière de mes actes.

    Je n’étais à la base, ni Française, ni Anglaise, je n’avais pas une grande et prospère famille comme auraient pu le suggérer mes lieux de résidence, mes voyages à l’étranger, mes moyens de locomotions parfois très coûteux et mon habillage sophistiqué.

    En vérité, j’avais vu le jour dans un petit village perdu dans les Carpates de Transylvanie, non loin de Brashov. Je n’avais pas, ou plus de parents, puisqu’ils avaient décidé de m’abandonner, faute d’argent ou d’amour. J’avais habité un orphelinat où l’on ne m’avait pas dit grand-chose de qui avaient été mes parents, si ce n’est que ma mère était encore fort jeune lors de son mariage avec mon père, qui lui était bien plus âgé, puisqu’elle n’avait alors que 15 ans. C’était en réalité très courant en Roumanie, à cette époque, et je me disais encore souvent que c’était probablement toujours le cas. C’était un passage de ma vie que je n’appréciais pas, et que je ne me plaisais pas à raconter pour apitoyer les autres sur mon pauvre, pauvre, sort.

    Je détestais l’orphelinat. Je ne m’y sentais pas bien, on se serait cru dans un film parodique, un drame exagéré de pauvres enfants abandonnés, et pourtant, c’était bien la réalité pour moi. Je vivais cette réalité tous les jours. De plus, la vie avec les autres enfants ne me plaisaient pas, je les trouvais dégoûtants, détestables, comme des animaux prêts à mordre. Non pas qu’à l’époque je valus tellement mieux. Toutefois, en dépit de ma pauvre naissance, j’avais été gratifiée d’un sens de l’ambition, visiblement plus développé que ceux des autres, qui se destinaient tous à l’exploitation agricole. Et même si mes espoirs d’enfant pouvaient paraître vains, je ne perdais pas mon objectif de vue : sortir de ce trou. Notre éducation à l’orphelinat était très basique, peu de logiques, nous apprenions des textes, sans véritablement les comprendre, les mathématiques n’étaient pour nous que des lignes à retenir par cœur sous peine de se faire punir par l’instituteur. J’avais à peine appris à lire.

    Quelques centaines de kilomètres plus à l’ouest, ce genre de vie aurait paru absurde et tout à fait surréaliste pour de cette « si grande » Europe, mais c’était pourtant mon quotidien. La Transylvanie n’était alors que peu développée dans les villages perdus et dans les régions plus reculées, auxquels on ne s’intéressait pas. Je m’imaginais comment devait être la vie en ville, à Bucarest par exemple. Je voyais aussi des images à la télé de grandes villes européennes et américaines et je me demandais comment le sort m’avait si mal loti. J’enviais tous ces enfants dans leurs belles maisons garnies et à la pointe de la technologie. Comment pouvaient-ils avoir eu tant de chance, et tant de richesses, et moi si peu ? Pourquoi eux ? Pourquoi pas moi ? J’avais choisi pour objectif de gagner les grandes villes, et de jouir moi aussi, de toutes ces richesses.

    Malheureusement, mon enfance ne se résuma pas à mes espoirs pour le futur. L’activité principale du coin concernait l’exploitation agricole mais également le tourisme. Les gens qui le pouvaient, gagnaient une certaine somme en faisant visiter aux touristes curieux le coin et ses merveilles. Je ne comprenais d’ailleurs pas ces personnes, si bien habillées qui venaient dans mon pays quand il y avait tellement mieux ailleurs. Ils visitaient les châteaux du coin, sur lesquels existait un nombre incalculable de mythes. Ils achetaient des souvenirs tout à fait ridicules et buvaient les paroles des guides qui n’éprouvaient aucun remords quand il s’agissait de leur raconter de pures inventions. A l’orphelinat, nous nous moquions de ces esprits crédules qui s’attendrissaient sur nous, comme sur des agneaux, lorsque nous jouions dans le village.

    Un des mythes qui faisait le tourisme du coin mais également du reste de la Transylvanie parlait de la présence de créatures relevant sur surnaturel. Il y avait selon la légende dans les montagnes aiguisées des Carpates, mille monstres dangereux, se révélant une fois la nuit venue et s’abattant sur les villageois pour les dévorer ou pour leur sucer le sang. Inutile de préciser qu’il n’y avait que les touristes et les vieillards à moitié fous pour croire en ces histoires. Mais cela faisait marcher le pays, alors nous gardions ces histoires dans notre culture et chaque enfant en connaissait le contenu.

    Un évènement lors d’une soirée pourtant modifia le cours de mon existence. Je n’aurais jamais pensé voir une telle chose arriver, tout cela me paraissait tellement...irréel. J’étais loin de me douter de la proximité entre la fiction et la réalité. Ainsi, lors d’une douce soirée d’automne, lorsque les nuits commençaient à se rallonger, les responsables de l’orphelinat nous autorisèrent à sortir et à jouer dans le village. Trop peu nombreux pour nous tenir en laisse, nous avions tout le loisir de leur fausser compagnie et d’errer là où nous voulions et de nous amuser selon notre bon désir.

    J’étais alors avec deux autres filles de mon âge, j’avais huit ans et je n’étais pas préparée à voir ce qu’il m’a été donné d’assister. Nous courions partout, trop heureuses pour nous soucier de qui nous pouvions rencontrer, riant allégrement au gré de notre curieuse et fertile innocence.

    Tous se passa très vite. Nous approchions d’une rue plus étroite mais mes amies plus agiles et rapides, me dépassèrent et je les perdis de vue. Quand enfin je pus les apercevoir, deux ombres se penchaient sur chacune d’entre elles. Je me tenais au coin de la rue, ce qui me permit dès que la stupeur me prit, de me dissimuler derrière. Que se passait-il ? Pourquoi mes deux amies s’étaient-elles endormies ? Pourquoi ces sombres personnages dont je ne pouvais distinguer le visage les tenaient dans leur bras ? Saisie d’effroi, je n’osai pas approcher et pris la fuite comme une voleuse. Une action que par la suite, je me suis reprochée à maintes reprises.

    Lorsque je le signalai aux responsables et aux autres habitants du village, dans les premiers temps, on ne me prit pas au sérieux. C’est seulement quand, ne répondant pas à l’appel, ils se rendirent compte que les deux filles avaient disparu. Une fouille du village fut entreprise. Tout le monde y participa, mais sans résultat. Ce ne fut que quelques jours plus tard, qu’on retrouva leurs deux corps inertes, perdus dans les collines. On pleura beaucoup mais sans trouver d’explication à cette mort. Moi, je l’avais vu, j’en étais certaine. Mais comme on aurait pu s’en douter, personne ne crut à mes histoires.

    Ma perception des mythes de Transylvanie en pâtit. Devant la moquerie des autres, je commençais à m’instruire et à chercher des informations sur ce que j’avais vu. Je questionnais les habitants, sceptiques, cependant j’obtenais de leur part des histoires qui me perturbaient autant qu’elles m’effrayaient. Je commençais à croire aux histoires pour touristes, celles des monstres qui avaient parcouru nos terres, celles des vampires et des loups-garous. Mes escapades nocturnes me donnèrent raison. Les années passèrent et je fus témoin de nouveaux évènements. Il fallait que je quitte ces terres, coûte que coûte.

    Lorsque vint l’âge pour moi de quitter l’orphelinat, je ne perdis pas mon temps dans ces régions, et rejoignis Bucarest. Au fur et à mesure que je me rapprochais de la civilisation, je découvrais de nouvelles choses, une toute autre vie. A ma portée. Mais comment allais-je subvenir à mes propres besoins, mes besoins vitaux ? Dans un premier temps, j’eus beaucoup de mal à me trouver une place, je dormais dans les gares, je ne mangeais rien, ou presque, je subsistai grâce à l’aide de ceux qui avaient pitié de ma pauvre allure. Je mendiais. Mais ensuite, trop déçue de mon destin que j’avais voulu beau et riche, et effrayée par la possibilité de rencontrer des monstres, une fois perdue et seule, je me trouvai des petits boulots. Je les collectionnais, si bien que je travaillais, avec beaucoup d’espoir, presque en permanence.

    Je réussis par la suite à me trouver un petit loft à bas prix. Je découvris un monde meilleur, plus de possibilités. Mais je restai effrayée par ce que j’avais aperçu et je continuai à m’instruire dans les bibliothèques. J’appris beaucoup et prenais connaissance de rumeurs selon lesquelles il existerait des organisations qui chassaient les monstres par delà le monde, ce qui permettait aux habitants d’ignorer les monstres et de vivre paisiblement. J’appris également qu’on pouvait croiser des personnes dans la rue, bien sous tous rapports, qui dissimulaient en vérité, l’un d’eux.

    Parallèlement, j’entrepris des études d’histoire dans une des universités de la ville de Bucarest grâce à une bourse. J’avais décidé de m’en sortir, et de quitter ce pays. Pour ce fait, je commençai à apprendre les langues étrangères.

    Une fois sortie et diplômée, je me trouvai un emploi qui me permit de voyager en Europe et puis dans le monde. Un emploi qui me passionnait. J’étais chargée de recherches dans des musées. Je me perdais dans leurs immenses bibliothèques dans les étages inférieurs des bâtiments. Je fouillais les archives, je remplissais les dossiers. Je découvrais chaque coin de chaque musée et j’apprenais beaucoup.

    Lorsque je fus mutée au Vatican pour prendre connaissance des archives, une organisation étrange qui semblait tout savoir de moi prit contact avec mon employeur...

    C’est ainsi que je fus employée. C’est ainsi que mon apprentissage et mon entraînement intensif commencèrent. C’est ainsi que je devins agent du terrain. Je gardai ma couverture de chercheur pour voyager et commençai la chasse.


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Dernière édition par Catalina Petrescu le Jeu 22 Avr - 3:41, édité 2 fois
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Alessandro Ricci
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Alessandro Ricci


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Catalina Petrescu Empty
MessageSujet: Re: Catalina Petrescu   Catalina Petrescu Icon_minitimeMar 20 Avr - 10:13

Que dire devait cette fiche...


Gaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah !!!!!

ou encore...

Waaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah !!!


ou encore...


Naaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaan je veux la suiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiite !!!!! T_T


Bref, c'est tout bonnement génial Smile
A ce niveau là le présence d'un test rp est totalement superflue, donc je te valide d'office, bienvenue dans le monde des ombres jeune Catalina, attention de ne pas te faire mordre trop rapidement Wink
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Catalina Petrescu
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